Page:Tinayre - La Rancon.djvu/267

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rien. Il y a une nuance entre soupçonner et savoir. Vous oubliez que s’il est votre ami il est, plus encore, l’ami de Paul. Allez, si nous étions découverts, il ne faudrait compter sur l’indulgence de personne.

Ses yeux s’emplirent de larmes. Elle murmura :

— Tous ceux que j’aime, tous ceux que j’estime nous ont condamnés, hier. Ils ont raison, je le sens… Toute la nuit, j’ai pensé à cela… C’est affreux de mentir toujours, de jouer la comédie de la vertu, de tromper un honnête homme… de se donner au mari après…

— Tais-toi ! cria Chartrain…

— Mais…

— Tais-toi ! Il y a un an, il y a six mois, nous n’étions pas moins coupables. Tu étais heureuse pourtant. Tu ne pensais pas à nous juger… Oui, tu m’aimais tant que tu me trouvais des excuses. Est-ce l’opinion des autres qui me rabaisse à tes yeux ?… Parle donc. Tu as peur d’être méprisée et tu te forces à me mépriser, maintenant.

Il marchait à grands pas avec une sorte de fureur.

— Qu’y a-t-il donc de changé ?… Crois-tu que je n’aie pas souffert jusqu’à la torture du mensonge, du partage que j’acceptais ? J’ai pleuré de