Page:Tinayre - La Rancon.djvu/284

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chaînais en toi et que j’apaisais, la communion mystérieuse à jamais rompue. Ah ! Jacqueline, quoi que tu me répondes, malgré les explications ingénieuses que te dicte la pitié, je sens, profondément, atrocement, mon impuissance. Je te presse sur mon cœur gros de voluptés et d’angoisses, et je t’étreins sans te posséder, décevante amie qui te dérobes et sembles déserter ta propre chair… Je te lie à moi, je t’embrasse et tu es loin de moi, loin de toi-même, et je te poursuis et je ne puis te saisir… Jacqueline, c’est de cela que je meurs, c’est cet horrible effort vers toi qui m’épuise l’âme et la tue… Tais-toi. Ne réponds pas. Je pressens ce que tu vas dire : que tu n’es pas responsable des caprices de tes nerfs, que ton cœur n’a pas changé, que tu m’aimes. Ah ! ma bien-aimée, l’amour, entre nous, n’a qu’un langage et nous ne nous comprenons plus parce que tu l’as oublié. Les baisers, les caresses ne valent que parce qu’ils expriment ; mais la passion ne s’exprime que par les caresses et les baisers… Écoute, écoute. Tu as cru voir en moi un héros. Je ne suis qu’un homme, un pauvre homme au cœur avide, aux sens troublés, un homme qui aime et qui souffre. Aie pitié. Ouvre-moi tes bras, sans arrière-pensée, sans réticences, docile