Page:Tinayre - La Rancon.djvu/63

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inclinée, les yeux voilés par ses cils pudiques, un rose plus vif errant sur ses joues, elle murmura :

— Je ne saurais vous donner ce livre tout de suite… Il faut que je le cherche… et si cela ne vous dérange pas… je vous le remettrai moi-même, en passant, demain, dans l’après-midi.

Elle tendait aux braises écroulées son petit pied chaussé de satin noir, et posée comme un oiseau, sous la vive lumière des candélabres, elle espérait un mot de reconnaissance émue. Elle fut glacée quand Étienne répondit presque sèchement :

— Je ne veux pas vous donner cette peine. Je reprendrai le livre lundi prochain.

Jacqueline ne bougea pas. Un chagrin brusque gonflait son cœur, serrait sa gorge, remplissait de larmes ses yeux baissés…

Tout à coup, elle entendit la voix de son ami, tout altérée, tout adoucie.

— Non… Pourquoi me refuser à moi-même une joie que je n’espérais plus ? Vous viendrez, n’est-ce pas, vous viendrez ?

Elle leva les yeux : le Chartrain qu’elle croyait perdu, le Chartrain de l’été précédent était devant elle. Elle reconnaissait sa voix, son sourire, l’éclat bleu de son regard. Et après la douleur d’être