Page:Tinayre - La Rancon.djvu/90

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êtes un peu heureux tout de même de savoir que je pense à vous, que je partage vos joies et vos peines, que je vous aime tout à fait, pour toujours ?

— Je n’aurais pas rêvé ce bonheur, dit-il en serrant la jeune femme sur son cœur. J’en reste muet. Je n’y puis croire. Ah ! mon amie, ma divine Jacqueline, mon amour inespéré, est-ce bien vous ?

— C’est moi, Étienne, c’est moi… pour toujours !…

— Je suis accablé. Trouver une telle félicité dans l’abîme du désespoir, cela brise les pauvres forces humaines. Je vous ai tant aimée, je vous aime tant ! Oh ! répétez-moi que vous m’aimez ! Je ne me lasse pas de vous l’entendre dire… Ma chérie ! ma Jacqueline, regardez-moi.

— Je vous aime, Étienne, je vous aime…

Longuement, chastement, ils s’embrassèrent sur le divan où ils avaient échangé leur premier baiser… Étienne entourait Jacqueline de ses bras.

Les yeux fermés, il appuyait sa joue sur les doux cheveux de son amie avec la paix d’un naufragé qui rentre au port. Et il lui semblait qu’ils étaient, elle et lui, deux pauvres êtres abandonnés à des volontés obscures et que d’obscures fatalités avaient conduits l’un vers