Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/201

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— Autrefois, oui… J’étais un peu emballé… J’aurais compromis votre carrière de veuve irréprochable…

— Moquez-vous de moi !

— Pas du tout ! Vous souhaitiez rester libre et ménager l’opinion… Vous m’avez enseigné qu’on peut tout faire, à la condition de « ne pas avoir l’air »… Et moi, bon élève, docile amant, je n’ai pas eu l’air de vous attendre, je n’ai pas eu l’air de vous désirer, je n’ai pas eu l’air d’être triste, je n’ai pas eu l’air d’être content… Et, à force de ne pas avoir l’air d’être ceci ou cela…

— Vous ne savez plus ce que vous êtes…

— Je suis un homme accablé de besogne et désolé de vous quitter.

— Un homme qui n’est pas amoureux !

— Qu’entendez-vous par ce mot ?

Elle rit, étend les bras et laisse ses yeux luire de côté, sous les cils blonds…

— J’entends l’amoureux sentimental… Le monsieur qui a le cœur tendre et la larme toujours prête…

— Jouer ce rôle, près de vous, Renée, ce serait jouer un rôle de sot.

Elle déclare avec une ferme conviction :

— Vous le joueriez très mal. Vous êtes un sceptique sensuel.

— Et vous ?

— Je ne sais pas.

— Vous êtes une prude voluptueuse !

— Merci bien. Appelez-moi donc Arsinoé !

— Vous êtes trop jeune.

— C’est la première parole un peu aimable que vous