Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/278

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suis sorti du paradoxe et de l’abstraction, que je suis aux prises avec des faits, je sens que je suis un homme comme tous les autres, ni plus libre, ni plus juste, ni meilleur… Ah ! Josanne, ah ! mon amour, je suis jaloux !… Je ne suis pas un moraliste qui juge, un philosophe qui ergote… Je suis un homme qui aime, je suis un amant désespéré !… Le bien, le mal, vos devoirs, vos droits, la justice, la logique, je m’en moque !… Je ne sais plus que ça ma Josanne !… Je suis jaloux !

— Mon pauvre Noël !

— Vous pleurez !… Moi, je n’ai pas pu pleurer…

— Mon Dieu ! est-ce bien nous qui nous sommes dressés l’un contre l’autre en adversaires ?… Nous qui nous aimons !…

— Josanne, Josanne, dites-moi que vous n’aimez plus cet homme !

— Je ne l’aime plus…

— Dites-moi que vous ne l’avez pas aimé, vraiment aimé…

— Je ne peux pas dire cela, Noël !

— Ah !

— Ma conduite n’avait qu’une excuse : l’amour… Si j’avais cédé à un caprice, m’estimeriez-vous davantage ?

— Je ne sais pas… Je souffrirais moins… Un caprice, c’est vite oublié… J’en ai eu, moi, des caprices, que j’appelais des amours !… Qu’en reste-t-il ?… Pas même de la cendre… rien… rien… Mais vous !… En parlant de cet homme, tout à l’heure, vous étiez remuée, malgré vous… Ah ! j’ai eu un instant de colère aveugle !… Maintenant, ma violence n’est plus que de