Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/73

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ramages d’or usés par le vent. Et, devant elle, et autour d’elle, les très anciennes maisons, basses et pointues, semblaient prosternées.

Une lampe s’alluma, au premier étage d’une petite bâtisse que précédait un jardin clos de murs. La façade regardait le flanc gauche de la cathédrale. Des lucarnes hérissaient le toit moussu qui se confondait avec les toits compliqués d’une chapelle, d’un patronage et d’un couvent. Le mur du jardin avait un réverbère à son angle et, sur sa crête, des touffes d’un lierre luisant. Un judas grillé, une boîte aux lettres, ornaient la porte cintrée, peinte en bleu.

La lampe, à travers les rideaux blancs, faisait un point lumineux et Josanne l’aperçut de l’autre bout de la place. Chaque soir, en revenant de l’Institution Chantoiseau, où elle donnait des leçons, — en revenant du cimetière, — elle voyait cette petite lueur qui l’appelait, qui lui disait :

« Tu n’es pas seule au monde… »

Elle était veuve depuis cinq mois… Dans les premiers jours de mai, la maladie de Pierre Valentin avait pris un caractère nouveau, avec des crises aiguës : — les douleurs révélatrices du cancer. — Et le malheureux, conscient de son état, n’avait plus eu qu’un désir, — un obstiné, un aveugle désir de moribond : — quitter Paris, revenir à Chartres, mourir dans la maison de ses parents, près de la vieille tante qui l’avait reçu à sa naissance, et qui avait adopté son enfance orpheline… Les médecins, consultés par Josanne, répondaient : « Accordez-lui cette joie suprême. Il vivra quelques mois encore, un an peut-être, mais nous ne pouvons rien pour lui, que