Aller au contenu

Page:Tinayre - Notes d une voyageuse en Turquie.djvu/347

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
333
LA VIE AU HAREM

à la langue, à la religion même de ses ancêtres… Elle a dit, à l’époux, les paroles de Ruth à Noéimi :

« Ton pays sera mon pays ; ton Dieu sera mon Dieu. »

C’est très touchant, très beau, mais tout de même un peu terrible… Pauvre dame vénérable et douce, elle a dû souffrir souvent, non par regret de son courage, certes, puisqu’elle aimait, mais parce que la destinée lui a réservé bien des épreuves. Elle a vécu dans l’ombre de la tyrannie ; elle a vu son fils, sa fille partir pour l’exil peut-être éternel ; et, après la revanche inespérée, après le triomphe, elle a vu ce même fils, cette même fille menacés de mort.

Comme je regrette de ne pouvoir lui parler ! Elle ignore le français, et je ne comprends pas l’allemand. Ahmed-Riza bey traduit nos compliments réciproques. Et l’heure coule… Nous n’avons pas dit la moitié de ce que nous voulions dire, et Mélek Hanoum m’avertit qu’il se fait tard, et que l’état de siège existe encore dans la banlieue de Constantinople.