Page:Tissot - Princesses des lettres.djvu/77

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testante, Mlle Émilie Naville, il nous la montrerait — selon les paroles d’une vieille amie — « dans la grâce de sa jeunesse ; elle venait saluer sa mère avant d’aller en soirée ; une robe de soie mauve moulait son corps de Diane chasseresse, une écharpe de blonde voilait ses épaules et les boucles de ses cheveux dorés encadraient son visage aux traits délicats et sérieux… » Cet historiographe futur ne manquera point de remarquer que si Mlle Naville était pâle de teint, bleue de prunelles et auburn de chevelure, c’est qu’elle tenait de sa mère, née Todd, du sang écossais, tandis que, dans la franchise de ses gestes, de ses paroles, elle se montrait bien, avec tout ce que ce cliché historique sous-entend de courage moral, la libre fille de la libre Helvétie, qu’elle était de par son père, le distingué Louis Naville. Et les pages resteraient pleines d’enseignement où seraient reconstituées cette enfance normale, cette famille puritaine, toute cette austère, cette calviniste Genève de 1860, bien différente de la cosmopolite Genève de 1909, laquelle, d’un geste péremptoire, vient de briser le joug religieux, sous lequel, trois siècles, l’avait asservie le sinistre homme de Noyon. En vérité, entre la cité aux lois somptuaires d’autrefois, et la ville aux ha-