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Page:Tissot - Principes du droit public, 1872.djvu/62

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déterminée d’après la nature et la destinée de l’homme, d’après les intérêts et les droits individuels par conséquent, est l’objet ou la fin du droit public.

Cette raison d’être du droit public, aussi ancienne que l’humanité, fait donc remonter l’origine rationnelle ou de droit de l’Etat à l’origine même du monde. La raison veut en effet que l’homme, qui ne peut atteindre sa destinée, c’est-à-dire être tout ce qu’il peut et doit être, qu’au sein de la société et par la société, vive en commerce avec ses semblables ; que l’individu soit pour ses associés, comme ils doivent être pour lui, un soutien et une force, un moyen de défense et d’attaque contre les puissances ennemies ou rebelles de la nature.

Or pour mettre les forces d’une communauté au service de chacun de ses membres, pour coordonner et discipliner toutes ces forces, pour les faire tendre toutes au bien général, il faut une intelligence, une volonté et une force supérieures. Et comme toutes les intelligences, toutes les volontés et toutes les forces individuelles sont présumées égales, comme elles sont semblables, comme elles sont d’ailleurs mauvais juges d’elles-mêmes chacune en comparaison avec les autres, comme la force de tous est manifestement supérieure à la force d’un seul, comme enfin l’intérêt public est l’intérêt de tous ; rien n’est plus rationnel que de mettre la force publique au service de la volonté générale sous la direction de la pensée commune.

Ce n’est point à dire, ne nous y trompons pas, que la volonté générale, celle d’une majorité quelconque