Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 1.djvu/273

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donné à lui-même. Je ne sais si dans ces monarchies les affaires sont mieux dirigées qu’ailleurs ; mais du moins il y a toujours quelqu’un qui, bien ou mal, suivant sa capacité, s’en occupe.

Dans les États électifs, au contraire, à l’approche de l’élection et longtemps avant qu’elle n’arrive, les rouages du gouvernement ne fonctionnent plus, en quelque sorte, que d’eux-mêmes. On peut sans doute combiner les lois de manière à ce que l’élection s’opérant d’un seul coup et avec rapidité, le siége de la puissance exécutive ne reste pour ainsi dire jamais vacant ; mais, quoi qu’on fasse, le vide existe dans les esprits en dépit des efforts du législateur.

À l’approche de l’élection, le chef du pouvoir exécutif ne songe qu’à la lutte qui se prépare ; il n’a plus d’avenir ; il ne peut rien entreprendre, et ne poursuit qu’avec mollesse ce qu’un autre peut-être va achever. « Je suis si près du moment de ma retraite, écrivait le président Jefferson, le 21 janvier 1809 (six semaines avant l’élection), que je ne prends plus part aux affaires que par l’expression de mon opinion. Il me semble juste de laisser à mon successeur l’initiative des mesures dont il aura à suivre l’exécution et à supporter la responsabilité. »

De son côté, la nation n’a les yeux tournés que sur un seul point ; elle n’est occupée qu’à surveiller le travail d’enfantement qui se prépare.

Plus la place qu’occupe le pouvoir exécutif dans la direction des affaires est vaste, plus son action habituelle