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Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/317

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Il est facile de répondre. Ce n’est pas dans l’intérêt des nègres, mais dans celui des blancs, qu’on détruit l’esclavage aux États-Unis.

Les premiers nègres ont été importés dans la Virginie vers l’année 1621[1]. En Amérique, comme dans tout le reste de la terre, la servitude est donc née au Sud. De là elle a gagné de proche en proche ; mais à mesure que l’esclavage remontait vers le Nord, le nombre des esclaves allait décroissant[2] ; on a toujours vu très peu de nègres dans la Nouvelle-Angleterre.

Les colonies étaient fondées ; un siècle s’était déjà écoulé, et un fait extraordinaire commençait à frapper tous les regards. Les provinces qui ne possédaient pour ainsi dire point d’esclaves croissaient en population, en richesses et en bien-être, plus rapidement que celles qui en avaient.

  1. Voyez l’Histoire de la Virginie, par Beverley. Voyez aussi, dans les Mémoires de Jefferson, de curieux détails sur l’introduction des nègres en Virginie et sur le premier acte qui en a prohibé l’importation en 1778.
  2. Le nombre des esclaves était moins grand dans le Nord, mais les avantages résultant de l’esclavage n’y étaient pas plus contestés qu’au Sud. En 1740, la législature de l’État de New York déclare qu’on doit encourager le plus possible l’importation directe des esclaves, et que la contrebande doit être sévèrement punie, comme tendant à décourager le commerçant honnête. (Kent’s Commentaries, vol. II, p. 206.)

    On trouve dans la Collection historique du Massachusetts, vol. IV, p. 193, des recherches curieuses de Belknap sur l’esclavage dans la Nouvelle-Angleterre. Il en résulte que, dès 1630, les nègres furent introduits, mais que dès lors la législation et les mœurs se montrèrent opposées à l’esclavage.

    Voyez également dans cet endroit la manière dont l’opinion publique, ensuite la loi, parvinrent à détruire la servitude.