Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/403

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Presque tous les actes dont je viens de parler ont eu lieu sous la présidence du général Jackson. On ne saurait nier que, dans l’affaire du tarif, ce dernier n’ait soutenu avec habileté et vigueur les droits de l’Union. Je crois cependant qu’il faut mettre au nombre des dangers que court aujourd’hui le pouvoir fédéral la conduite même de celui qui le représente.

Quelques personnes se sont formé en Europe, sur l’influence que peut exercer le général Jackson dans les affaires de son pays, une opinion qui paraît fort extravagante à ceux qui ont vu les choses de près.

On a entendu dire que le général Jackson avait gagné des batailles, que c’était un homme énergique, porté par caractère et par habitude à l’emploi de la force, désireux du pouvoir et despote par goût. Tout cela est peut-être vrai, mais les conséquences qu’on a tirées de ces vérités sont de grandes erreurs.

On s’est imaginé que le général Jackson voulait établir aux États-Unis la dictature, qu’il allait y faire régner l’esprit militaire, et donner au pouvoir central une extension dangereuse pour les libertés provinciales. En Amérique, le temps de semblables entreprises et le siècle de pareils hommes ne sont point encore venus : si le général Jackson eût voulu dominer de cette manière, il eût assurément perdu sa position politique et compromis sa vie : aussi n’a-t-il pas été assez imprudent pour le tenter.

Loin de vouloir étendre le pouvoir fédéral, le Président actuel représente, au contraire, le parti qui veut