malgré les rigoureuses punitions qui suivent de près les infractions les plus légères. »
Suit le procès-verbal d’un interrogatoire subi devant l’inspecteur par un certain nombre de détenus. Il en résulte que ces criminels, non-seulement savent le nom de leurs voisins d’ateliers, mais connaissent le lieu de naissance de ceux-ci, leur histoire, la cause de leur condamnation, l’époque de leur sortie, leurs desseins ultérieurs, en un mot, tout ce que la règle du silence a pour but de leur cacher. »
L’inspecteur-général dit en terminant : « Si le silence n’est pas observé ici, il l’est encore bien moins ailleurs. »
Il faut ajouter qu’en admettant même qu’une grande administration comme la nôtre puisse arriver, à un moment donné, à établir dans nos prisons un silence complet, il serait très-difficile qu’elle le maintînt pendant longtemps. Il n’y a pas de matière dans laquelle il soit plus aisé de se relâcher. Chaque infraction au silence, prise isolément, a peu d’importance et ne saurait paraître bien criminelle. Celui qui en est témoin ne se sent guère disposé à punir un délit si excusable. L’infraction, en se renouvelant souvent et en beaucoup d’endroits, finit cependant par détruire ou par énerver la règle. Mais c’est là un résultat général que n’aperçoit pas clairement et d’avance chaque gardien qui n’a que le petit fait particulier sous les yeux.
Il est donc à croire que, dans la plupart de nos prisons, le silence cesserait peu à peu d’être observé. Or, le silence formant le trait principal du système, le système lui-même perd avec lui la plus grande partie de sa valeur.
En supposant, d’ailleurs, que le silence puisse être observé d’une manière continuelle et absolue, possibilité que l’on conteste même en Amérique, resterait encore un danger fort grave, dont la Commission a été très-occupée.
Si, dans le système que nous venons de décrire, les détenus ne peuvent pas se parler, ils se voient du moins tous les jours, ils se connaissent, et, sortis de la prison, il se retrouvent dans le sein de la société libre. Là ils s’empêchent réciproquement de revenir au bien ; ils se portent nmtuellement au mal, et ils forment ces associations de malfaiteurs qui, dans ces derniers temps surtout, ont compromis la sûreté publique et la vie des citoyens.