Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/452

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cipes, par quelle conduite doit-on espérer y parvenir ? Ce sont là, messieurs, les vraies et sérieuses questions que le sujet de la réduction de l’effectif soulève.

En fait, le système que nous suivons pour gouverner le pays qui nous est soumis, quoique varié dans ses détails, est partout le même. Différents fonctionnaires indigènes, établis ou reconnus par nous, administrent, sous des noms divers, les populations musulmanes ; ce sont nos intermédiaires entre elles et nous. Suivant que ces chefs indigènes sont près ou loin du centre de notre puissance, nous les soumettons à une surveillance plus ou moins détaillée, et nous pénétrons plus ou moins avant dans le contrôle de leurs actes, mais presque nulle part les tribus ne sont administrées par nous directement. Ce sont nos généraux qui gouvernent ; ils ont pour principaux agents les officiers des bureaux arabes. Aucune institution n’a été, et n’est encore plus utile à notre domination en Afrique, que celle des bureaux arabes. Plusieurs Commissions de la Chambre l’ont déjà dit, nous nous plaisons à le répéter. Ce système, qui a été fondé en partie, organisé et généralisé par M. le maréchal Bugeaud, repose tout entier sur un petit nombre de principes que nous croyons sages.

Partout le pouvoir politique, celui qui donne la première impulsion aux affaires, doit être dans les mains des Français. Une pareille initiative ne peut nulle part être remise avec sécurité aux chefs indigènes. Voilà le premier principe.

Voici le second : La plupart des pouvoirs secondaires du gouvernement doivent, au contraire, être exercés par les habitants du pays.

La troisième maxime du gouvernement est celle-ci : C’est sur les influences déjà existantes que notre pouvoir doit chercher à s’appuyer. Nous avons souvent essayé, et nous essayons encore quelquefois, d’écarter des affaires l’aristocratie religieuse ou militaire du pays, pour lui substituer des familles nouvelles et créer des influences qui soient notre ouvrage. Nous avons presque toujours échoué dans de pareils efforts, et il est aisé de voir, en effet, que de tels efforts sont prématurés. Un gouvernement nouveau, et surtout un gouvernement conquérant, peut bien donner le pouvoir matériel à ses amis, mais il ne saurait leur communiquer la puissance morale et la force d’opinion qu’il n’a pas lui-même. Tout ce