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RAPPORT


FAIT À LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS AU NOM DE LA COMMISSION CHARGÉE DE L’EXAMEN DU PROJET DE LOI PORTANT DEMANDE D’UN CRÉDIT DE 5 MILLIONS DE FRANCS POUR LES CAMPS AGRICOLES DE L’ALGÉRIE (2 JUIN 1847).


Nous n’entreprendrons pas de démontrer à la Chambre que l’établissement paisible d’une population européenne sur le sol de l’Afrique serait le moyen le plus efficace d’y asseoir et d’y garantir notre domination. Cette vérité a été mise bien des fois en lumière, et nous n’avons rien à dire ici, sinon que votre Commission l’a admise comme démontrée.

Deux membres seulement, sans nier l’utilité du résultat à atteindre, ont contesté qu’il fût humain et sage de tenter une semblable entreprise.

Le pays qu’il s’agit de coloniser, ont-ils dit, n’est pas vide ou peuplé seulement de chasseurs, comme certaines parties du Nouveau-Monde. Il est déjà occupé, possédé et cultivé par une population agricole et souvent même sédentaire. Introduire dans un tel pays une population nouvelle, c’est y éterniser la guerre et y préparer la destruction inévitable des races indigènes.

Ils ajoutaient : Le climat, d’ailleurs, nous en repousse. Des expériences nombreuses ont prouvé que l’Européen ne s’y acclimate jamais, et que ses enfants ne peuvent y vivre.

Ces objections, messieurs, quelque graves qu’elles pussent paraître en elles-mêmes, et quelques force qu’elles empruntassent au talent de ceux qui les présentaient, n’ont point arrêté la Commission.