Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/36

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nimation et de naturel, et cela ne plaisait pas à Anna Pavlovna.

— Les moyens sont l’équilibre européen et le droit des gens, — disait l’abbé. — Il faut qu’un état puissant comme la Russie, réputée barbare, se mette avec désintéressement à la tête d’une union dont le but est l’équilibre de l’Europe, et elle sauvera le monde !

— Comment trouverez-vous un pareil équilibre ? commençait Pierre ; mais à ce moment s’approcha Anna Pavlovna, et, regardant sévèrement Pierre, elle demanda à l’Italien comment il supportait le climat de Pétersbourg. La physionomie de l’Italien se transforma d’un coup et prit l’expression doucereuse, affable et offensée, qui lui était évidemment habituelle en causant avec des femmes : « Je suis tellement accablé par le charme de l’esprit et de l’intelligence de cette société, et surtout de la société féminine dans laquelle j’ai eu l’honneur d’être reçu, que je n’ai pas encore réussi à penser au climat, dit-il. »

Ne lâchant plus l’abbé et Pierre, Anna Pavlovna, pour la commodité de l’observation, les joignit au groupe commun.

À ce moment, un nouvel arrivant entra au salon. C’était le jeune prince André Bolkonskï, le mari de la petite princesse. Le prince Bolkonskï était un jeune homme de petite taille, très joli, avec des traits secs et accentués. Toute sa personne,