Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol10.djvu/243

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notre armée, et il me semble que lui-même n’y devrait pas survivre. S’il raconte que nos pertes sont grandes, ce n’est pas vrai, peut-être quatre mille, pas davantage, mais il n’y a même pas cela. Et si même dix mille, qu’y faire ? C’est la guerre. Mais en revanche, les pertes ennemies sont considérables.

» Qu’était-ce de rester encore deux jours ? Au moins, eux-mêmes seraient partis, car ils n’avaient pas d’eau pour les hommes ni pour les chevaux. Il m’avait donné sa parole qu’il ne reculerait pas, mais, tout d’un coup, il a envoyé la disposition indiquant qu’il partait pendant la nuit. On ne peut faire la guerre de cette façon, et nous pouvons amener bientôt l’ennemi à Moscou.

» Le bruit court que vous pensez à la paix. Que Dieu nous en préserve ! Après tant de sacrifices, et après une reculade si folle, faire la paix ! Vous mettriez toute la Russie contre vous et chacun de nous aurait honte de porter l’uniforme. Au point où nous en sommes, nous devons nous battre tant que la Russie aura de forces, tant que les hommes auront des jambes.

» Il ne faut qu’un seul commandant et non deux. Votre ministre est peut-être bon dans son ministère, mais, non seulement il est mauvais général, il n’est bon à rien, et c’est à lui qu’on remet le sort de toute notre patrie ! Vraiment je deviens fou de dépit. Pardonnez-moi d’écrire si hardiment. Évidemment celui qui n’aime pas son empereur et dé-