Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol10.djvu/84

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ment des troupes, blâmaient cette modestie excessive et ne désiraient qu’une chose, sur laquelle ils insistaient : que leur empereur adoré, laissant toute méfiance superflue, déclarât ouvertement qu’il se mettait à la tête de l’armée, qu’il installât l’état-major de commandant en chef et, prenant conseil où il fallait, qu’il conduisît lui-même ses troupes, que ce fait seul amènerait l’enthousiasme à son paroxysme.

Le huitième groupe, le plus grand, qui, par le nombre, était aux autres dans la proportion de 99 à 1, comprenait les gens qui ne désiraient ni la paix ni la guerre, ni le mouvement offensif, ni le camp défensif, à Drissa ou ailleurs, ni Barclay, ni l’empereur, ni Pfull, ni Benigsen, mais qui désiraient une seule chose : le plus de plaisirs et d’avantages personnels. Dans cette eau trouble d’intrigues croisées, embrouillées, qui fourmillaient autour du quartier général de l’empereur, on pouvait faire beaucoup de choses impossibles à tout autre moment. L’un, qui n’avait que le désir de ne pas perdre sa situation avantageuse, aujourd’hui était d’accord avec Pfull, demain, avec son adversaire ; le surlendemain, pour éviter la responsabilité et flatter l’empereur, il affirmait n’avoir aucune opinion sur un certain sujet. Un autre désirait acquérir des avantages, attirait à lui l’attention de l’empereur en criant tout haut ce à quoi l’empereur, la veille, avait fait allusion. Ils discutaient, et