Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/153

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le village et près des isbas, au bord de la route, mit ses fusils en faisceaux.

Comme un immense animal à mille bras, le régiment se mit à arranger son logis et à préparer sa nourriture.

Une partie des soldats, dans la neige jusqu’aux genoux, s’enfonça sous la forêt de bouleaux qui était à droite du village et aussitôt on y entendit un bruit de haches, de craquement de branches coupées, et de voix gaies.

Une autre partie se disposait autour des fourgons et des chevaux rassemblés, tirait les marmites, les biscuits, et donnait à manger aux chevaux.

Les autres se dispersaient dans le village, installaient les logements des officiers de l’état-major, sortaient les cadavres des Français restés dans les isbas, enlevaient les planches, le bois et la paille des toits pour les bûchers et défonçaient les clôtures.

Derrière les maisons, au bout du village, une quinzaine de soldats, avec des cris joyeux, balançaient la haute barrière d’un hangar duquel on avait déjà enlevé la toiture.

— Eh bien ! Eh bien ! D’un coup ! Plus fort ! criaient des voix, et, dans l’obscurité de la nuit, se balançait une immense claie couverte de neige.

Les craquements du bois étaient de plus en plus fréquents ; enfin la claie tomba avec des soldats qui