Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/414

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l’activité libre ou non des hommes ? Voilà la question de l’histoire.

Ce n’est qu’en notre temps, en ce temps de vulgarisation de la science, grâce à l’arme la plus forte de l’ignorance, le développement de l’imprimerie, que la question de la liberté de la volonté est placée sur tel terrain où elle ne peut même exister. En notre temps, la majorité des hommes dits avancés, c’est-à-dire la foule des ignorants, a accepté les travaux des naturalistes qui s’occupent d’un seul côté de la question et les ont pris pour solution de toute la question.

Il n’y a pas d’âme ni de liberté parce que la vie d’un homme s’exprime par le mouvement des muscles, et les mouvements des muscles sont sous la dépendance de l’activité nerveuse ; il n’y a pas d’âme ni de liberté parce que, dans une période inconnue de temps, nous sommes descendus du singe, écrivent-ils et disent-ils, ne soupçonnant même pas que des milliers d’années auparavant toutes les religions et tous les penseurs non seulement reconnaissaient mais ne niaient jamais cette même loi de la nécessité qu’avec tel soin on tâche de prouver maintenant par la physiologie et la zoologie comparées. Ils ne voient pas que dans cette question le rôle des sciences naturelles consiste seulement à servir d’instrument pour éclairer un seul côté, car le fait qu’au point de vue de l’observation la raison et la volonté ne sont que des sé-