Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/52

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— Que voulez-vous, m’sieu ? demanda une voix dans l’obscurité.

Pétia répondit qu’il avait besoin du garçon français pris ce jour.

— Ah ! Vessinia ! fit le Cosaque.

Les Cosaques avaient déjà changé son nom Vincent en celui de Vessinia, et les paysans et les soldats en celui de Vissenia. Dans les deux variantes le nom, dérivé de printemps[1], rappelait la jeunesse du garçon.

— Il se chauffe là-bas, près du bûcher. Eh ! Vissénia ! Vissénia ! Vissénia ! avec des rires, entendait-on dans l’obscurité.

— C’est un brave garçon, dit le hussard qui était près de Pétia. Nous lui avons donné à manger, il avait une faim de loup !

Des pas s’entendirent dans l’obscurité, et, les pieds nus clapotant dans la boue, le tambour s’approcha de la porte.

Ah ! c’est vous ! dit Pétia. Voulez-vous manger ? N’ayez pas peur, on ne vous fera pas de mal, ajouta-t-il timidement en lui touchant tendrement la main. Entrez, entrez.

Merci, monsieur, répondit le tambour d’une voix tremblante presque enfantine, et il se mit à essuyer sur le seuil ses pieds sales.

Pétia voulait lui dire beaucoup de choses mais

  1. En russe « Vesna ».