Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol13.djvu/486

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a été fait dans une voie fausse, exclusive, sans importance et sans avenir, minime en comparaison des voies et même des œuvres de cet art dont nous trouvons les modèles chez le peuple. Je me suis convaincu qu’une poésie lyrique, par exemple : « Je me rappelle le merveilleux moment… », les œuvres musicales comme la dernière symphonie de Beethoven ne sont pas si absolument et universellement belles que la chanson populaire de « Vanka », ou : « En descendant sur notre mère Volga… » ; que Pouschkine et Beethoven nous plaisent non parce qu’ils expriment la beauté absolue, mais parce que nous sommes aussi gâtés que Pouschkine et Beethoven, parce que Pouschkine et Beethoven flattent également notre nervosité monstrueuse et notre côté faible. Le paradoxe vulgaire que, pour comprendre le beau, il faut une certaine instruction, est devenu une banalité. Qui le dit ? Comment est-ce prouvé ? Ce n’est qu’un trou pour sortir de la situation sans issue à laquelle nous ont conduits la fausseté de nos opinions, le rattachement exclusif de notre art à une certaine classe. Et pourquoi ? La beauté du soleil, la beauté du visage humain, la beauté d’une chanson populaire, d’un acte d’amour et de sacrifice sont accessibles à chacun et ne demandent pas d’instruction préalable.

Je sais que pour la majorité tout cela semblera du bavardage, mais la pédagogie — la pédagogie libre — explique par l’expérience plusieurs ques-