Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol13.djvu/487

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tions, et, par la répétition fréquente des mêmes phénomènes, fait passer les questions du domaine des rêves et des discours à celui des propositions prouvées par les faits. J’ai travaillé des années pour transmettre aux élèves les beautés poétiques de Pouschkine et de toute notre littérature, et cela en vain. Une quantité innombrable de maîtres, en Russie et ailleurs, font la même chose, et si ces maîtres veulent vérifier sincèrement les résultats de leurs efforts, ils reconnaîtront que la principale conséquence du développement du sentiment poétique, c’est son propre anéantissement : ce sont les natures poétiques elles-mêmes qui ont montré le plus grand dégoût pour une interprétation pareille. J’ai travaillé des années, dis-je, sans rien obtenir, mais il m’a fallu ouvrir, par hasard, le recueil des chansons populaires de Ribnikov et le sentiment poétique des élèves a trouvé pleine satisfaction, satisfaction que je ne pouvais ne point trouver légitime en comparant froidement, sans parti pris, la première chanson qui me tomba sous la main avec la meilleure œuvre de Pouschkine. C’est aussi ce qui m’est arrivé avec la musique dont je dois maintenant parler.

Je vais tâcher de résumer ce que j’ai dit. À la question : « Les beaux-arts sont-ils nécessaires au peuple ? » le pédagogue hésite et ordinairement s’embrouille (seul Platon résolut hardiment et négativement cette question), : On dit que c’est