Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol14.djvu/299

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— Non, j’ai jeté le noyau par la fenêtre !

Tout le monde rit et Vania se mit à pleurer.


Pourquoi un Paysan aima son Frère aîné.
Histoire vraie.

J’aimais déjà beaucoup mon frère aîné, mais, depuis qu’il m’a remplacé sous les drapeaux, je l’aime encore devantage. Voici comment la chose se passa :

Nous tirâmes au sort, et je fus désigné pour partir au régiment ; j’étais marié depuis huit jours à peine. J’étais très attendri d’être obligé de laisser ainsi ma jeune femme. Ma mère se mit à pleurer et dit :

— « Comment Pétrouchka pourra-t-il partir ? il est si jeune ? »

Mais il n’y avait rien à faire ; on commença les préparatifs de départ.

Ma femme me fit des chemises, me donna de l’argent, car je devais me rendre le lendemain à la ville, au bureau de recrutement. Ma mère se désolait, pleurait, et moi, quand je songeais que je devais partir, je sentais mon cœur se serrer comme si je devais aller à la mort.

Le soir, nous étions tous réunis pour le souper ; personne ne pouvait manger : mon frère aîné, Nicolas, restait couché sur le poêle et ne disait rien.