Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol14.djvu/331

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sang lui coulait sur les yeux. Il ne pouvait s’installer plus commodément sur le cheval ni essuyer le sang qui l’aveuglait. Ses mains étaient attachées si serrées, qu’il en avait les épaules endolories.

Ils allèrent ainsi, pendant longtemps, de montagne en montagne ; ils traversèrent une rivière à gué, puis débouchèrent sur la grand’route entre deux collines.

Jiline tâcha de voir où on le menait, mais ses paupières étaient collées par le sang et il ne pouvait se mouvoir.

La nuit vint. Ils traversèrent encore une rivière et escaladèrent une montagne pierreuse. Alors parut une fumée et un aboiement se fit entendre. On était arrivé au village tatar.

Les Tatars descendirent de cheval. Des enfants se rassemblèrent et entourèrent Jiline. Ils lui jetaient des pierres, en poussant des cris joyeux.

Un Tatar dispersa les enfants, descendit Jiline et appela un serviteur.

Un Nogaï, aux pommettes saillantes, vêtu d’une simple chemise déchirée, laissant voir la poitrine, vint. Le Tatar lui dit quelques mots. Le Nogaï rapporta deux morceaux de bois munis d’anneaux de fer s’ouvrant au moyen d’une clé.

On délia Jiline, on passa ses pieds dans les anneaux, qu’on referma à clé, et on le poussa dans