Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol14.djvu/444

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sayant de le renverser. Il se fit un mouvement ; l’arbre se mit à balancer son feuillage, secouant des gouttes de rosée ; et les pétales brisés des fleurs blanches, des fleurs odorantes, tombèrent sur nos fronts.

À ce moment même, quelque chose, me sembla-t-il, cria, craqua dans le milieu de l’arbre. Nous redoublâmes d’efforts ; un nouveau craquement se fit entendre, semblable à un sanglot, et l’arbre tomba.

Il se cassa près de l’entaille, et, se balançant, vint se coucher, branches et fleurs, sur l’herbe. Après la chute, branches et fleurs tremblèrent un moment, puis redevinrent immobiles.

— Oh ! le bel arbre ! fit le paysan, c’est vraiment dommage !

Et pour moi, c’était si « vraiment dommage » que je m’enfuis bien vite vers les autres ouvriers.


Comment marchent les arbres.

Une fois, nous nettoyions, sur la colline, près de l’étang, un petit chemin couvert. Après avoir, à coups de hache, taillé force églantiers, saules, peupliers, nous arrivâmes à un putiet. Il avait poussé au beau milieu du chemin, tellement grand et vigoureux, qu’il ne pouvait avoir moins de dix ans.

Or, je savais que le jardin avait été nettoyé cinq ans avant. Je ne pouvais nullement comprendre