Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/110

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pouvait songer à lui sans éprouver une certaine gêne bien qu’il fût un parfait homme du monde ; mais leurs rapports sonnaient faux, non que cela vînt de lui, qui se montrait plein de sincérité et de charme, mais d’elle-même. — Ses relations avec Lévine étaient tout à fait naturelles et pures. Mais en revanche, aussitôt qu’elle envisageait l’avenir avec Vronskï, elle entrevoyait la perspective d’une existence brillante et heureuse ; avec Lévine au contraire, l’avenir restait imprécis.

Étant montée dans sa chambre afin de s’habiller pour la soirée, elle se regarda dans la glace et constata avec joie qu’elle était dans un de ses bons jours, en pleine possession de tous ses charmes ; elle en fut d’autant plus heureuse, qu’elle avait besoin, ce soir-là, de tout son calme extérieur et de toute la liberté de ses mouvements.

À sept heures et demie elle descendit au salon, et aussitôt le valet annonça : « Constantin Dmitriévitch Lévine ». La princesse était encore dans sa chambre et le prince n’était pas encore descendu. « C’est lui ! » pensa Kitty et tout son sang lui afflua au cœur. Elle se vit dans la glace et fut effrayée de sa pâleur.

Maintenant elle était sûre qu’il était venu plus tôt exprès, pour la trouver seule et se déclarer aussitôt. Pour la première fois, elle envisagea la situation sous un jour tout à fait nouveau. Seulement alors, elle comprit qu’il ne s’agissait pas d’elle