Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/128

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tout à fait arrangée et qu’il se prononcerait dès l’arrivée de sa mère.

Mais précisément, en entendant ces mots, le prince s’emporta tout à coup et commença à proférer de violentes paroles.

— Ce que vous avez fait ! Je vais vous le dire ! Premièrement, vous avez relancé un fiancé, ce dont tout Moscou parlera et avec raison. Si vous donnez des soirées, invitez alors tout le monde et non pas seulement des prétendants choisis, invitez tous ces blancs becs (le prince appelait ainsi les jeunes gens de Moscou). Faites venir un tapeur et qu’ils dansent, mais n’agissez pas comme aujourd’hui. Vous invitez des prétendants et ménagez des entretiens ; j’en ai honte, honte ; et vous avez atteint votre but, vous avez tourné la tête à la petite. Lévine vaut mille fois mieux que ce petit fat de Pétersbourg ; on les fait au moule là-bas, ils sont tous les mêmes, et pas un ne vaut quelque chose. Et quand bien même il serait prince du sang, ma fille n’a besoin de personne…

— Mais qu’ai-je donc fait ?

— Je vous le dis !… s’écria le prince avec colère.

— Je sais que si l’on t’écoutait, interrompit la princesse, nous ne maririons jamais notre fille. En ce cas, mieux vaut partir à la campagne.

— Oui, cela vaut mieux.

— Mais, enfin… Peux-tu me reprocher de faire des avances ? Je ne cherche nullement. Mais un