Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/242

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tienne, et elle ne fait que se fâcher sans cesse et ne voit que des ennemis, et c’est toujours le Christ et la vertu qui sont en jeu. »

Après la comtesse Lydie Ivanovna, Anna eut encore la visite de la femme du directeur, qui lui raconta tous les potins de la ville et partit à trois heures en promettant de revenir pour le dîner. Alexis Alexandrovitch était à son ministère. Restée seule, Anna, avant le dîner, s’occupa du repas de son fils (l’enfant dînait à part), mit en ordre ses affaires et répondit, après les avoir lus, aux billets et lettres qui s’étaient accumulés sur sa table pendant son absence.

Le sentiment de honte inexplicable qu’elle avait éprouvé pendant la route et son émotion disparaissaient complètement ; en reprenant sa vie habituelle, elle se retrouvait de nouveau calme et irréprochable.

Elle se rappelait avec étonnement son état de la veille.

« Qu’avais-je donc ? Rien, en somme. Vronskï a dit une folie à laquelle il est très facile de ne pas donner suite, et j’ai répondu comme il le fallait. En parler à mon mari ? Non, ce n’est pas la peine, ce serait attacher de l’importance à ce qui n’en a pas. » Elle se rappela lui avoir raconté une fois qu’un de ses jeunes subordonnés lui avait presque fait une déclaration et qu’Alexis Alexandrovitch lui avait répondu alors que la même chose pouvait