Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/398

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difficultés de cacher leurs amours aux yeux du monde auquel il était nécessaire de mentir, qu’il fallait tromper. Et il lui fallait mentir, tromper, dissimuler, sans cesse penser aux autres, tandis que la passion qui les liait était si forte que tous deux oubliaient tout ce qui n’était pas leur amour !

Il se rappelait nettement toutes les occasions si nombreuses qui le forçaient à mentir et à tromper, ce qui répugnait tant à sa nature. Il se rappelait avec une acuité particulière le sentiment de honte que provoquait en elle, ainsi qu’il l’avait remarqué plusieurs fois, cette obligation de mentir et de tromper ; et il éprouvait une sensation étrange, que depuis sa liaison il ressentait parfois. C’était comme un sentiment de dégoût envers Alexis Alexandrovitch, envers lui-même, ou même envers tout le monde ; il ne le savait au juste. Il refoulait toujours ce sentiment étrange. Et maintenant, tout en se secouant, il laissait libre cours à ses idées.

« Oui, auparavant, elle était malheureuse mais fière et calme, tandis que maintenant elle ne peut avoir ni fierté ni dignité, bien qu’elle ne le montre pas. Oui, il faut en finir, » conclut-il.

Et pour la première fois lui venait en tête l’idée nette qu’il fallait en finir avec ce mensonge et cela le plus vite possible. « Quitter tout et aller nous cacher tous les deux quelque part, seuls avec notre amour ! » se disait-il.