Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/450

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Alexis Alexandrovitch se tut pendant qu’on causait autour de lui et aussitôt il se remit à parler.

— Je conviens que si ce ne sont pas des jeux d’hommes…

Mais à ce moment les cavaliers s’élancèrent et toutes les conversations s’arrêtèrent. Alexis Alexandrovitch se tut aussi, et tous, debout, regardèrent du côté de la rivière. Alexis Alexandrovitch ne s’intéressait pas aux courses, aussi ne regardait-il pas les cavaliers et il continuait à promener ses yeux fatigués sur les spectateurs. Son regard s’arrêta sur Anna.

Son visage était pâle et sévère. Évidemment elle ne voyait rien ni personne sauf un seul. Sa main serrait nerveusement l’éventail ; elle ne respirait pas. Il la regarda et détourna hâtivement ses yeux sur d’autres visages. « Oui, voici encore une dame et encore d’autres qui sont très émues. C’est très naturel, » se dit Alexis Alexandrovitch. Il ne voulait pas la regarder, mais, malgré lui, il était attiré vers elle. De nouveau il fixa ce visage, sans y vouloir lire ce qui, si clairement, y était inscrit, et malgré lui, avec horreur, il y découvrait ce qu’il ne voulait pas savoir.

La première chute, celle de Kouzovlev, dans la rivière, avait ému tous les spectateurs, mais Alexis Alexandrovitch vit clairement sur le visage pâle, triomphant d’Anna, que celui qu’elle regardait n’était pas tombé. Quand, après que Makhotine et