Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol16.djvu/164

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— les échos lointains de polkas et de valses parvenaient en effet jusqu’à eux. — En quel honneur cette fête ?

— Pour l’arrivée de Serpoukhovskoï.

— Ah ! dit Vronskï, je ne savais pas.

Ses yeux brillèrent d’un éclat plus vif.

Ayant pris ou plutôt s’étant imposé la résolution de sacrifier son ambition au bonheur que lui procurait son amour, Vronskï ne pouvait se montrer jaloux de Serpoukhovskoï, ni lui en vouloir de n’être pas venu tout d’abord chez lui ; en somme, c’était un bon camarade et il était heureux de le revoir.

— Vraiment, j’en suis très heureux, ajouta-t-il.

Le colonel Démine occupait une grande maison de campagne. Au moment où ils arrivèrent, toute la société se trouvait sur le balcon, très large, du premier étage. Dans la cour, Vronskï remarqua tout d’abord les chanteurs en costumes de treillis, réunis autour d’un petit fût d’eau-de-vie, puis le colonel, un homme à la puissante carrure et au teint réjoui, qui se tenait au milieu du cercle des officiers. Il était sur les premières marches de la terrasse et d’une voix qui dominait l’orchestre en train de jouer un quadrille d’Offenbach, il donnait, en agitant les mains, des ordres à un groupe de soldats, qui se tenait un peu en côté. Quelques soldats, le vaguemestre et plusieurs sous-officiers, s’approchèrent de la terrasse en même temps que Vronskï. Le colonel, qui était retourné à table, re-