crainte que la respiration lui manqua et qu’il ne put prononcer les paroles qu’il voulait dire.
« Comment est-elle, pensa-t-il, comment est-elle ? Comme autrefois ou comme je l’ai vue en voiture ? Et si Daria Alexandrovna avait dit vrai ? »
— Ah ! je t’en prie, présente-moi à Karénine, prononça-t-il avec effort.
Et, d’un pas désespéré et résolu, il entra au salon ; aussitôt il l’aperçut.
Elle n’était ni comme autrefois, ni comme il l’avait vue en voiture. Elle était tout à fait différente.
Elle paraissait effrayée, timide, gênée, et cette attitude contribuait à la rendre encore plus ravissante. Elle l’aperçut dès qu’il entra au salon. Elle l’attendait. Elle était heureuse ; mais son trouble fut si grand au moment où il s’approcha de la maîtresse de la maison et la regarda de nouveau, qu’elle faillit pleurer ; Dolly et Lévine le remarquèrent. Elle rougit, pâlit, rougit de nouveau puis resta immobile, remuant à peine les lèvres, attendant qu’il vînt à elle. À part le léger tremblement des lèvres et l’humidité qui voilait ses yeux tout en ajoutant à leur éclat, son sourire était presque calme quand elle dit :
— Il y a longtemps que nous ne nous sommes vus !
Et avec une résolution désespérée, elle serra dans sa main froide la main que lui tendait Lévine.
— Vous ne m’avez pas vu, mais moi je vous ai