Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol16.djvu/61

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Le lendemain de leur arrivée, il plut à verse et pendant la nuit l’eau pénétra dans le corridor et dans la chambre des enfants, si bien qu’il fallut transporter les petits lits dans le salon. On ne pouvait pas trouver de cuisinière pour les domestiques ; sur neuf vaches, les unes au dire de la vachère étaient pleines, d’autres avaient leur premier veau, les autres étaient trop vieilles, d’autres enfin étaient malades ; il n’y avait pour les enfants ni beurre ni lait, pas même d’œufs ; impossible de se procurer des poules ; il fallut se contenter de faire cuire de vieux coqs bleus et filandreux. On ne pouvait non plus trouver de femmes pour laver les parquets, toutes étaient occupées à planter des pommes de terre. Il ne fallait pas songer davantage à faire des promenades car aucun cheval ne voulait se laisser atteler.

Quant à se baigner c’était chose impossible : le bétail avait raviné le bord de la rivière et l’on était trop en vue de la route. On ne pouvait même se promener autour de la maison parce que les bêtes entraient dans le jardin, par suite du mauvais état des barrières, et il y avait un taureau terrible qui mugissait et donnait des coups de cornes. Pas non plus d’armoires à robes ; celles qui existaient fermaient mal ou s’ouvraient d’elles-mêmes aussitôt qu’on passait devant. Enfin, il n’y avait ni marmites, ni pots de terre, ni lessiveuse à la buanderie, ni même de planche à repasser.