Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol18.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chambre à coucher porter à la vieille princesse une icône dans un cadre de vermeil. Avec la femme de chambre de la princesse il avait fouillé une armoire pour y chercher quelque chose et avait écrasé la petite veilleuse ; la femme de chambre l’avait calmé en lui parlant de sa femme et de la veilleuse, et il avait soigneusement placé l’icône sous l’oreiller de Kitty. Mais où, quand et pourquoi tout cela ? il n’en savait rien. Il ne comprenait même plus pourquoi la princesse lui prenait la main et le regardant avec commisération lui demandait d’être calme ; pourquoi Dolly le priait de manger, le faisait sortir de la chambre, et même pourquoi le docteur le regardait sérieusement, avec compassion, et lui proposait des remèdes quelconques.

Il savait et sentait seulement que ce qui se faisait maintenant était semblable à ce qui se passait une année auparavant, dans l’hôtel de province, au lit de mort de son frère Nicolas. Mais là-bas c’était le malheur, ici la joie. Toutefois ce malheur et cette joie étaient également en dehors de toutes les conditions habituelles de la vie, c’était comme des trous à travers lesquels paraissait quelque chose de supérieur. Également pénible, également incompréhensible était ce qui s’accomplissait, et à ce spectacle son âme s’élevait à une hauteur que jusqu’ici elle n’avait atteinte, qu’elle ne comprenait même pas et où la raison ne la suivait pas.