Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol18.djvu/135

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Stépan Arkadiévitch, non seulement en paroles mais en réalité, croyait à l’exactitude de cette affirmation. Jivakhov avait 300.000 roubles de dettes, pas un sou vaillant, néanmoins il vivait, et comment encore ! Le comte Krivstov, tout le monde désespérait de lui, cependant il entretenait deux maîtresses ! Pétrovski avait dépensé cinq millions et il continuait à vivre sur le même pied, il était même gérant d’un établissement financier quelconque et recevait 20.000 roubles d’appointements.

En plus de tout cela, Pétersbourg avait une heureuse action physique sur Stépan Arkadiévitch : il le rajeunissait. À Moscou, il lui arrivait d’examiner ses cheveux blancs, de s’endormir après le dîner, de se sentir lourd, de s’essouffler en montant un escalier, de s’ennuyer dans la société des femmes, de ne pas danser au bal. À Pétersbourg il se sentait rajeuni de dix ans. Il éprouvait ce que lui avait dit la veille le sexagénaire prince Oblonskï, Pierre, qui venait d’arriver de l’étranger.

— Ici, nous ne savons pas vivre. Le croirais-tu, j’ai passé l’été à Bade et vraiment je me suis senti un tout jeune homme. Apercevais-je une jeune femme, aussitôt il me venait des idées… Après le dîner on boit un peu, ça donne des forces. Je suis rentré en Russie, j’ai dû aller chez ma femme, à la campagne, eh bien, au bout de deux semaines, je ne quittais plus ma robe de chambre, je ne m’habil-