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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol19.djvu/91

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croyaient et en quoi ils voyaient le sens de la vie.

Malgré toutes les concessions que je faisais, toutes les discussions que j’écoutais, je ne pouvais accepter la religion de ces gens. Je voyais que ce qu’ils faisaient passer pour la foi, n’était pas l’explication mais l’obscurcissement du sens de la vie, et qu’eux-mêmes affirmaient leur foi non pour répondre à cette question de la vie qui m’avait amené à la religion, mais en vue d’un but quelconque, qui m’était étranger. Je me rappelle le sentiment douloureux que m’inspirait la terreur du retour à l’ancien désespoir, après l’espoir que j’avais ressenti plusieurs fois à la suite de mes rapports avec ces personnes.

Plus elles m’exposaient en détail leurs conceptions, plus je voyais clairement leur erreur et sentais s’évanouir mon espoir de trouver dans leur religion l’explication du sens de la vie.

Ce qui me repoussait, ce n’était pas le fait que, dans l’exposé de leur doctrine, elles associaient aux vertus chrétiennes, qui toujours m’avaient été chères, maintes choses inutiles et déraisonnables. Non, ce qui me repoussait, c’est que la vie de ces gens était semblable à la mienne, avec cette seule différence qu’elle ne correspondait pas aux principes qu’ils exposaient dans leurs doctrines.

Je sentais clairement qu’ils se trompaient eux-mêmes, et qu’eux, comme moi, ne voyaient pas d’autre sens de la vie que celui-ci : vivre en accep-