Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol2.djvu/323

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Tchourisenok, lui, ne contredisait pas, mais quand le maître se tut, il objecta, en souriant un peu, que le mieux c’était d’installer dans ce hameau les vieux serfs attachés à la cour des maîtres et l’innocent Aliocha, pour qu’ils y gardent le blé.

— Voilà qui serait excellent — dit il en souriant de nouveau, — pour nous ce n’est rien, Votre Excellence.

— Mais qu’importe si l’endroit est inhabité ? — insistait patiemment Nekhludov, — ici, autrefois, c’était aussi un endroit inhabité, et voilà, les hommes y vivent, et là-bas ce sera pareil. Installe-toi le premier et de ta main heureuse… Oui, oui, installe-toi, absolument…

— Eh, petit père, Votre Excellence, peut-on comparer ! — répondit avec vivacité Tchouris, comme s’il craignait que le maître ne prît une décision définitive. — Ici, c’est un endroit où il y a du monde, un endroit gai et fréquenté, la route et l’étang sont côte à côte pour laver le linge de la famille et faire boire les bêtes, et tout ce qui est nécessaire aux paysans est installé depuis longtemps ; l’enclos, le potager et les saules blancs ont été plantés par mes parents, mon grand-père et mon père sont morts ici, et moi aussi, Votre Excellence, je voudrais finir mes jours ici, je ne demande rien de plus. Si votre grâce me donne de quoi réparer l’izba, nous serons très reconnaissants à votre grâce, et sinon, alors nous tâcherons de finir