Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol21.djvu/325

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Vous se rapporte aux disciples les plus proches de Dieu ; ceux qui l’écoutaient directement, et, en général à tous les disciples du Christ, aux vrais chrétiens.

Le sel de la terre. C’est une image. Le sel conserve la nourriture, la rend saine et agréable. Semblables au sel les chrétiens doivent, par leur activité, leur conduite, leur vie, préserver le monde de la pourriture morale et aider à sa santé spirituelle. Appelant sur le monde les bénédictions de Dieu par leurs prières, leur vie pure, agissant moralement sur leur milieu, ils doivent prévenir la chute complète du monde dans le vice et le crime, développer et fortifier en lui les idées et conceptions saines, les bons principes pour l’activité morale.

Si le sel perd sa force, etc., c’est-à-dire s’il cesse d’être salé. Sans doute cela est impossible. Le Saint Sauveur suppose seulement le cas pareil : le sel cessant d’être salé. D’ailleurs les voyageurs ont remarqué que dans ces pays il y a une sorte de sel qui peut perdre complètement sa force, et qui n’est plus bon qu’à être jeté dehors.

« J’ai cassé un morceau d’un sel, raconte un des voyageurs (Reuss nach Palestina von Maundrell, p. 102.), je l’ai exposé à la pluie, au soleil et à l’air, et bien que conservant l’aspect d’un morceau de sel, il avait complètement perdu sa saveur. À l’intérieur la saveur était conservée, ainsi que je pus m’en rendre compte par l’expérience. »

Cette expression imagée signifie : Si vous — disciples et les maîtres de l’univers — perdez la force intérieure, morale, ayant de l’influence sur le monde, alors que peuvent donner cette force et cette influence ? Rien. Si vous n’avez pas de force pour rénover le monde en le préservant de la décomposition et le fortifiant moralement, alors qu’adviendra-t-il de lui, et qui peut vous fortifier vous-mêmes et vous rendre capables de rénover le monde ? Rien.

Et vous-mêmes vous périrez, comme le sel qui a perdu sa saveur et que l’on jette sur la route. Surtout