Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol3.djvu/117

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tendait les rires. Loukachka s’éloignait des jeunes filles à pas lents, comme un chat, et tout à coup, sans bruit, en retenant son poignard qui se balançait, il s’inclina et courut, non vers sa maison, mais dans la direction de celle du khorounjï. Ayant parcouru deux rues, et tourné dans la petite ruelle, il souleva son manteau, s’assit à terre, dans l’ombre de l’enclos. « Voilà, cette fille du khorounjï ne veut même pas plaisanter, diable ! » — se dit-il en pensant à Marianka. « Attends un peu ! »

Il fut distrait par les pas d’une femme qui s’approchait.

Il se mit à écouter et rit en lui-même. Marianka, la tête baissée, à pas rapides et réguliers, en frappant d’une gaule la clôture, marchait droit vers lui. Loukachka se souleva. Marianka trembla et s’arrêta.

— C’est toi, maudit diable ! Tu m’as effrayée ! Et voilà, il n’est pas allé à la maison — dit-elle ; et elle éclata de rire.

Loukachka, d’une main étreignit la jeune fille et de l’autre lui prit le visage.

— Que voulais-je te dire ?… Je te jure !… — Sa voix tremblait et se coupait.

— Voilà quelle conversation il a trouvé la nuit ! — répondit Marianka. — Ma mère m’attend, et toi, va chez ta belle.

Et en se débarrassant de sa main, elle fit en courant quelques pas. Arrivée à l’enclos de sa cour,