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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/137

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Vorobiev. Hier je n’ai pas pu obtenir d’audience.

— Savez-vous pourquoi Vorobiev est baron ? demanda l’avocat à Nekhludov, ayant remarqué l’intonation ironique de son client en prononçant ce titre étranger accolé à un nom bien russe. Ce titre fut donné par l’empereur Paul à son grand-père, valet de chambre, je crois. Il lui avait rendu quelques services et l’empereur le nomma baron, parce que tel était son bon plaisir. Et depuis lors nous avons des barons Vorobiev. Celui-ci en est très fier ; c’est d’ailleurs une franche canaille.

— C’est chez lui que je vais aller, dit Nekhludov.

— Parfait ! Alors venez, je vais vous y laisser.

Comme ils sortaient, dans le vestibule, un domestique remit à Nekhludov un billet de Mariette :


« Pour vous faire plaisir, j’ai agi tout à fait contre mes principes, et j’ai intercédé auprès de mon mari pour votre protégée. Il se trouve que cette personne peut être relâchée immédiatement. Mon mari a écrit au commandant. Venez donc sans motif intéressé. Je vous attends. M… »


— Qu’en dites-vous ? demanda Nekhludov à l’avocat. N’est-ce pas épouvantable ! Voilà une femme qu’ils tiennent emprisonnée, au secret, depuis sept mois, et maintenant ils découvrent qu’elle n’a rien fait, et un mot suffit pour la faire relâcher !