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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/359

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encore moins avec la passion sensuelle éprouvée par la suite, ni même avec le sentiment du devoir accompli, uni à sa propre satisfaction d’avoir décidé, après le jugement, de l’épouser. Ce qu’il éprouvait, c’était simplement la pitié et l’attendrissement ressentis lors de sa première entrevue avec elle, dans la prison, puis, plus fortement, après son expulsion de l’hôpital, quand, maîtrisant son dégoût, il lui avait pardonné sa prétendue aventure avec l’infirmier, dont il avait appris plus tard l’inexistence. C’était le même sentiment, avec cette différence que, passager alors, à présent il était durable. Maintenant, quoi qu’il pensât, quoi qu’il fît, ce sentiment de pitié et d’attendrissement, non seulement pour elle mais pour tous les hommes, ne le quittait plus.

Ce sentiment semblait ouvrir dans l’âme de Nekhludov une source d’amour jusqu’alors sans issue et qui, maintenant, rejaillissait sur tous les hommes qu’il rencontrait.

Durant tout le voyage, Nekhludov se sentait dans un état d’excitation qui, malgré lui, le rendait sensible et attentif à l’égard de tous, depuis le cocher, le soldat de l’escorte, jusqu’au chef de la prison, au gouverneur, à tous ceux à qui il avait affaire.

À cette époque, Nekhludov, à cause du transfert de Maslova dans la section des criminels politiques, eut l’occasion de faire connaissance de