Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/74

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— Attends, oncle Sémion, laisse-le d’abord s’expliquer, dit de sa voix grave, imposante, le sage paysan.

Cela encouragea Nekhludov, et il commença à leur expliquer le projet de l’impôt unique, selon la théorie d’Henry George.

— La terre n’est à personne qu’à Dieu, dit-il.

— C’est juste ! Parfaitement ! approuvèrent plusieurs voix.

— Toute la terre doit être commune. Tous ont sur elle un droit égal. Mais il y a de la terre qui est bonne et d’autre qui l’est moins. Et chacun en voudrait de la bonne. Comment donc établir des parts égales ? Il faut que celui qui exploite une bonne terre paie, à ceux qui n’en ont pas, la valeur de la sienne, se répondit à lui-même Nekhludov. Mais comme il est difficile de décider quels sont ceux qui doivent payer, et à qui, comme l’argent est nécessaire aux besoins de la communauté, alors il faut convenir que quiconque possédera de la terre devra payer à la communauté, pour ses besoins, ce que vaut sa terre. Ainsi sera établie l’égalité. Tu veux posséder une terre : paie davantage pour une bonne que pour une qui l’est moins, tu ne veux pas de terre : alors tu ne paieras rien. Ceux-là seuls qui jouissent de la terre doivent payer l’impôt pour les besoins sociaux.

— C’est juste, opina le poêlier en remuant ses sourcils. Qui a la terre la meilleure paie plus cher !