Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/134

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primait beaucoup de cette indifférence tranquille qui semblait dire, à chaque affaire ou à chaque conversation : « Tout cela est fort bien. Je sais tout cela et pourrais le faire si seulement je voulais ».

— Que décidons-nous donc ? — interrogea de nouveau le jeune officier à son camarade en arkhalouk[1] — dormons-nous ici ou allons-nous plus loin avec notre cheval ?

Le camarade refusait de partir.

— Pouvez-vous vous imaginer, capitaine — continua celui qui versait le thé à l’officier sans bras et en soulevant le canif que celui-ci laissait tomber, — on nous a dit que les chevaux sont horriblement chers à Sébastopol, et alors nous avons acheté en commun un cheval à Simferopol.

— Je pense qu’on vous a pris bien cher !

— Vraiment, je ne sais pas, capitaine ; nous avons payé le cheval et la charrette 90 roubles. Est-ce trop cher ? — ajouta-t-il en s’adressant à tous et à Kozeltzov qui le regardait.

— Ce n’est pas cher si le cheval est jeune, — dit Kozeltzov.

— N’est-ce pas ? Et on nous a dit que c’est cher… seulement il est un peu boiteux, mais ça passera. On nous a dit qu’il est très fort.

— De quel corps êtes-vous ? — demanda Kozeltzov qui voulait savoir quelque chose sur son frère.

— Nous sommes maintenant du régiment de la

  1. Pèlerine longue que portent les officiers au Caucase.