Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/185

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découvert, du côté de l’entrée où, lui dit-on, se trouvait la neuvième compagnie. Littéralement on ne savait où poser le pied dans le blindage, tellement il était bondé de soldats, depuis l’entrée même. D’un côté brillait la chandelle courbée que tenait un soldat couché en éclairant le livre où un autre lisait en épelant. Près de la chandelle, dans la demi-lumière obscure du blindage, on voyait des têtes soulevées qui écoutaient avidement le lecteur ; le livre était un alphabet.

En entrant dans le blindage, Kozeltzov entendit :

« La pri-è-re a-près l’é-tu-de. Je te re-mer-cie, Cré-a-teur… »

— Mouchez la chandelle, au moins, dit une voix. C’est un bon livre.

— Mon Di-eu… — continuait le lecteur…

Quand Kozeltzov demanda d’appeler le sergent-major, le lecteur se tut, les soldats se remuèrent, toussotèrent, se mouchèrent comme il arrive toujours après un silence contenu. Le sergent-major, en se boutonnant, se levait près du groupe des lecteurs, et enjambant ou passant sur les jambes de ceux qui ne savaient où les mettre, il s’avança vers l’officier.

— Bonjour, mon garçon ! Quoi, c’est toute notre compagnie ?

— Salut ! Je vous félicite pour votre arrivée, Votre Noblesse ! — répondit le sergent-major en regardant gaîment et amicalement Kozeltzov. —