Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/275

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vissante ! Vous ne la connaissez pas ? Pas du tout ?

— Non.

— Vous savez, chez elle, la grâce féminine au plus haut degré ! la tendresse et ensuite quel amour ! Ô Dieu ! je ne pouvais alors apprécier ce bonheur. Ou, après le théâtre, nous revenions souper à deux. Avec elle, on ne s’ennuyait jamais, toujours gaie, toujours aimante. Oui, je ne pressentais pas quel rare bonheur c’était, et j’ai beaucoup à me reprocher envers elle, je l’ai fait souffrir et souvent, j’étais cruel. Ah ! quel merveilleux temps c’était ! Vous vous ennuyez ?

— Non, pas du tout.

— Alors je vous raconterai nos soirées. Bien, j’arrive, je rentre, — cet escalier dont je connaissais chaque plante, le loquet de la porte, tout cela si charmant, si connu, ensuite l’antichambre, sa chambre… Non, ce ne sera plus jamais, jamais ! Elle m’écrit jusqu’ici. Si vous voulez, je vous montrerai ses lettres… Mais non, je ne suis déjà plus le même, je suis perdu, je ne la mérite pas… Oui, je suis absolument perdu ! je suis cassé ! Il n’y a en moi ni énergie, ni fierté, rien. Même plus de noblesse… Oui, je suis perdu ! Et personne jamais ne comprendra mes souffrances. Tous y sont indifférents. Je suis un homme perdu ! Jamais je ne me relèverai, parce que moralement je suis tombé… dans la boue… tombé…

À ce moment on sentait dans ses paroles un dé-