Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/21

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— Allez-vous-en, — dit-il. — En voilà un crampon !

Et il regarde toujours sa bille.

Nekhludov s’approche de lui encore plus près, et lui prend le bras :

— Vous êtes un insolent, monsieur, — dit-il.

Il est mince, tout jeune, timide comme une jeune fille, mais cependant quel gaillard ! Ses yeux flamboient, on dirait qu’il veut l’avaler. Le grand client, c’était un homme fort, haut, quelle comparaison avec Nekhludov !

— Quoi ! Moi, un insolent ?

Et en même temps il lève la main sur lui. Tous ceux qui sont là bondissent, les saisissent tous les deux par les bras et les séparent.

Au milieu du vacarme grandissant, Nekhludov dit :

— Qu’il me donne satisfaction, il m’a offensé.

L’autre répond :

— Je ne connais aucune satisfaction, c’est un gamin, pas davantage. Je lui tirerai les oreilles.

— Si vous ne voulez pas me donner satisfaction, vous n’êtes pas un gentilhomme, — dit Nekhludov.

Et il est prêt à pleurer.

— Toi, — répond l’autre, — tu es un gamin. Je ne m’offense pas de tes paroles.

On les a séparés, comme à l’ordinaire, et entraînés dans diverses chambres.

Nekhludov était ami avec le prince.