koié regarder la nouvelle bâtisse. La table à thé était couverte et, en les attendant, je suis allée en bas, devant le piano.
Je retrouvai la sonate « Una quasi fantasia » et commençai à la jouer. On ne voyait et n’entendait personne, les fenêtres étaient ouvertes sur le jardin et les sons connus, tristes et solennels éclataient dans la chambre. Je terminai la première partie, et, tout à fait inconsciemment, par une vieille habitude, je me retournai vers ce coin où parfois il s’asseyait et m’écoutait. Mais il n’y était pas. La chaise, depuis longtemps abandonnée, était dans son coin et, par la fenêtre, on apercevait le bouquet de lilas au clair soleil couchant et la fraîcheur du soir entrait par la fenêtre ouverte. Je m’appuyai sur le piano, je couvris mon visage à deux mains et demeurai pensive. Pendant longtemps je restai assise ainsi, me rappelant avec douleur le vieux temps irretrouvable et pensant craintivement au présent. Plus rien ne me semblait à attendre ni à espérer. — « Ai-je déjà vécu ? » — pensai-je, et avec effroi, je dressai la tête, et, pour oublier et ne plus penser, je continuai de jouer le même andante. — « Mon Dieu, pardonne-moi, si je suis coupable, ou rends-moi tout ce qui était si beau dans mon âme, ou apprends-moi ce qu’il me faut faire, comment vivre maintenant ? »
Un bruit de roues s’entendit sur l’herbe et devant le perron puis sur la terrasse, résonnèrent les