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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/61

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neau, sautait de côté sur le siège, et de nouveau, parmi le sifflement monotone du vent, s’entendaient un craquement sonore et le bruit des clochettes. Chaque fois que le postillon de devant partait pour chercher les indices de la route ou des meules, on entendait du second traîneau la voix dégagée, assurée d’un des postillons qui criait au premier :

— Écoute, Ignachka, on a tourné tout à fait à gauche, prends donc à droite, du côté du vent ! Ou : Pourquoi tournes-tu sur place ? Va dans la direction de la neige, comme elle tombe et tu trouveras juste ; ou : Va à droite, à droite, mon vieux ! Tu vois quelque chose de noir, c’est sans doute un poteau. Ou : qu’est-ce que tu cherches ? Pourquoi t’égares-tu ? Dételle le bai et laisse-le en avant, alors il te mènera juste à la route. Ça vaudra mieux !

Et celui qui donnait le conseil, non seulement ne dételait pas le bricolier, et n’allait pas dans la neige chercher la route, mais ne sortait pas même le nez de son armiak. Et quand Ignachka, qui était devant, en réponse à un de ses conseils, lui cria d’aller lui-même en avant puisqu’il savait la bonne direction, le conseilleur répondit que s’il conduisait, lui, les chevaux du courrier, alors il les mènerait par la bonne route.

— Et nos chevaux n’avanceront pas pendant la tourmente ! — cria-t-il — ce ne sont pas de tels chevaux !…